L’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications du Congo ARPTC en sigle, est en pleine croisade contre le climat qui règne dans les sociétés de télécommunication en République Démocratique du Congo. Dans une directive adressée aux Directeurs Généraux de ces sociétés le 1er décembre 2010, son Président Manikunda Musata a ordonné comme nous l’annoncions, la suspension des offres commerciales forfaitaires « illimitées » pratiquées par ces opérateurs. A l’en croire, les diverses promotions mises en exergue dans ce secteur plombent le chiffre d’affaires de ces entreprises et occasionnent un important manque à gagner pour l’Etat. Tout porte à croire que l’augmentation effrénée du nombre d’abonnés attiré par le tarif au rabais n’a comme unique finalité que d’en faire un fond de commerce d’une nouvelle transaction. D’où, ce changement interminable de dénominations.
La théorie de la stagnation
Au regard de ce qui se passe dans le domaine de la téléphonie cellulaire, on a l’impression que les opérateurs de ce secteur pourtant en plein boom dans de nombreux pays africains, se sont donnés le mot pour fournir moins d’efforts dans ce champ pourtant marqué par la célérité et Innovation. Alors que la promotion est par essence une action marketing limitée dans le temps et dans l’espace, en RD Congo, les promotions forfaitaires se multiplient et se pérennisent.
Ce qui finit par lasser les abonnés, d’autant qu’elles provoquent la saturation des réseaux et occasionne la perte constante des unités de la part des clients. En témoigne le trop plein de plaintes dans les guichets du service « Clientèle ». La conséquence fatale de cette situation est que la qualité du service rendu aux usagers se dégrade tous les jours au grand dam des clients médusés et désabusés. Outre la congestion du réseau et la déperdition des unités consécutives à la durée incompressible d’utilisation que s’imposent, les opérateurs eux-mêmes ne s’en tirent pas toujours à bon compte, car on observe en leur sein une faiblesse aggravée de l’ARPU.
Devant un éventail aussi impressionnant de dégâts collatéraux pour le consommateur congolais, l’ARPTC a décidé en toute justesse de suspendre pendant une période de trois mois à partir de ce jeudi 02 décembre 2010, toutes les offres promotionnelles « illimitées » existant à ce jour chez les opérateurs de téléphonie mobile en RDC, après quoi, l’ARPTC installera la modélisation des coûts en partenariat avec les opérateurs, au terme de l’étude qu’elle entend mener pendant cette période.
La suspension est donc temporelle, circonstanciée et non définitive, rassure le président de l’ARPTC, M. Manikunda. Même si parmi les opérateurs, Tigo a demandé quelques temps de réflexion avant de se décider. L’ARPTC invite les uns et les autres à accorder le bénéfice de l’urgence, étant donné que c’est de la survie des télécommunications en Rdc qu’il s’agit. A l’heure actuelle, la tarification inter réseau se repartit comme suit : Zain vers Vodacom 150 cents ; 160 cents également vers CCT, et 136 cents vers Tigo pour le tarif du service Voix. Le service SMS est lui respectivement de 0,23, 080, 020, 030 et 0,26 cents. « Ces tarifs de détail d’appels voix et SMS intra réseaux ne peuvent pas être inférieurs aux tarifs de gros moyen », insiste-t-on à l’ARPTC.
Business contre absence d’investissements
Dans quelques jours, l’opérateur Zain passera sous le label de l’indien AIRTEL. Ce changement de dénomination dont les conséquences échappent aux yeux des utilisateurs du logo, est devenu une marque déposée de cet opérateur en RD Congo. Les observateurs qui suivent avec attention l’évolution du secteur de télécommunications depuis sa libéralisation, il y a quinze ans, savent qu’il y a peu, CELTEL était devenu ZAIN. Vendu 3 milliards de dollars en 2009, CELTEL-ZAIN rebaptisé AIRTEL, avec une révision du capital et de la charte graphique est aujourd’hui vendu avec ses abonnés à 9 milliards de dollars, soit 3 fois plus.
Comme on le voit dans cet affairisme, les actionnaires jouent aux enchères, vendant leur produit à un moment psychologique crucial. Cette pratique est d’autant plus néfaste qu’elle se traduit pour le pays d’accueil, en l’occurrence la RDC, par une absence criante d’une politique de réinvestissement susceptible de donner aux populations disséminées dans ce pays-continent l’opportunité de bénéficier des atouts des télécommunications devenu l’objet d’un marchandage permanent au détriment de l’investissement.
En clair, la RDC ne trouve pas son dompte dans le partenariat avec ZAIN, qui se caractérise par une propension à expatrier ses revenus sous d’autres cieux après avoir amusé la galerie en RDC. Tigo aussi a déjà changé d’acquéreur deux fois; mais au moins lui tient encore le coup. De tous les opérateurs évoluant au Congo démocratique, seul VODACOM a les deux pieds solidement appuyés sur le sol congolais depuis 2001. Avec la détermination de l’ARPTC, on peut parier qu’il ne sera pas accepté une autre OPA hostile à moyen terme avant devoir des efforts déployés dans l’élargissement du réseau à l’intérieur du pays.
L’ARPTC tient à la promotion d’une concurrence loyale entre les différents opérateurs. Elle mettra désormais, indique un membre de son collège, tout en oeuvrant pour favoriser la localisation du matériel de télécommunications dans l’arrière-pays qu’il faut impérativement désenclaver. En même temps qu’elle a pris en compte les doléances des opérateurs relatives aux taxes et redevances qui leur sont appliquées, et qui sont jugées trop élevées. Elle a aussi accepté d’en débattre dans l’intérêt de la République, des populations et des entreprises de télécommunication qu’elle incite à plus de civisme. L’affairisme tue les télécoms. Il faut arrêter, à temps, cette descente aux enfers s’il veut que ce secteur apporte à la RD Congo tous les bienfaits dont il est susceptible.
[readon1 url=”http://www.digitalcongo.net”]Source :digitalcongo.net[/readon1]