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christian_defaria_mtnGroup Chief Commercial Officer de l’opérateur MTN, le français Christian de Faria, n°2 du groupe, s’explique sur la stratégie du géant sud-africain. Premier opérateur télécom africain avec 158 millions d’abonnés, MTN, qui a démarré en 1994 en Afrique du Sud, est un acteur majeur du continent. Il fut d’ailleurs le premier et seul sponsor africain lors de la Coupe du monde en 2010.

Que représente l’Afrique pour MTN ?

Notre stratégie a toujours été de nous implanter dans les pays émergents. Nous sommes actuellement dans 21 pays, dont 15 en Afrique, le reste étant au Moyen-Orient (dont l’Afghanistan et l’Iran). En 2006, nous avions fait 12 acquisitions en rachetant le group Invescop. Au Nigéria, où nous comptons 45 millions d’abonnés, nous sommes devenus numéros un en dix ans.

Quel est votre principal objectif sur le continent?

C’est d’abord améliorer la pénétration dans la plupart des pays : en dehors de l’Afrique du Sud où elle approche déjà les 100% (NDLR : MTN y compte 18 millions d’abonnés, à égalité avec Vodacom-Vodafone), elle oscille en général entre 40 et 60%. Il reste donc d’énormes possibilités d’expansion dans les marchés ou nous sommes déjà, renforcée par l’arrivé de la data, dont la pénétration est encore faible. Par ailleurs, 95% de nos abonnés sont en prépayé et 15% seulement ont des smartphones, les possibilités de développement sont donc énormes. Et nous sommes toujours à l’affut de nouveaux territoires où nous installer.

Quels pays ?

Je ne peux pas vous donner de noms, mais il y a toujours des opportunités et nous les étudions. Il faut simplement qu’elles apportent vraiment de la valeur au groupe.

Comment définiriez-vous vos spécificités par rapport à la concurrence ?

Nous avons avant tout une marque très forte en Afrique, résultat d’énormes investissements depuis quinze ans, notamment lors de la Coupe du monde de football. Nous avons aussi réalisé d’énormes investissements en matière de responsabilité sociale et environnementale. Et l’une de nos grandes différences est d’avoir énormément investi en technologie, dans la 3G et dans la fibre, dont nous disposons dans tous nos pays. Si je prends le cas du Nigéria, nos investissements représentent entre 500 millions et 1 milliard de dollars US chaque année. Nous venons par ailleurs de lancer la 4G en Afrique du Sud, à Johannesburg et au Cap.

L’Afrique est en train d’être équipée de nouveaux câbles sous-marins. Qu’est-ce que cela va changer pour un opérateur comme vous ?

Nous sommes actionnaires d’EASSy, sur la côte Est, et de WACS sur la côte Ouest (NDLR : MTN n’a pas participé au projet ACE de France Telecom). Ces deux câbles de fibre optique vont nous donner la capacité de doubler toutes nos offres sur l’Internet et le haut débit. La technologie traditionnelle actuelle limitait en effet les produits que nous pouvions lancer sur l’Internet.

Quelle est votre stratégie en matière de paiement mobile, le terrain d’expansion qui excite tout les acteurs du marché africain, et pourquoi n’avez-vous pas développé votre propre monnaie, comme Safaricom avec son M-pesa au Kenya ?

Nous avons préféré baser notre « mobile money » sur la devise locale et elle est effective dans 14 pays, où nous comptons déjà 15 millions d’utilisateurs. Nous avons aussi lancé des produits comme l’« International Air time transfer », qui permet d’envoyer du temps de communication et aussi de l’argent à sa famille.

Avez-vos des projets en dehors de l’Afrique. Pourriez-vous par exemple devenir MVNO en Europe ?

Nous ne nous concentrons pas là-dessus. Les marchés où nous sommes ont d’énormes potentiels et notre savoir-faire concerne essentiellement les marchés émergents. Nous estimons que les marchés européens sont déjà saturés en MVNO, et qu’ils ne sont donc pas une priorité.

Quels sont les plus gros défis pour MTN aujourd’hui ?

L’environnement de régulation dans nos pays n’est pas au niveau de maturité où il devrait être. En matière d’allocation de fréquences, par exemple, il n’existe pas de normes communes comme en Europe et même si beaucoup d’efforts sont faits en matière de normalisation, cela prend un peu de temps… Ensuite, l’infrastructure de certains pays n’est pas encore au niveau, même si là aussi d’énormes efforts sont en cours, et dans certains pays, 80% de nos sites marchent encore sur des batteries, qu’on remplace progressivement par l’énergie solaire. Globalement, les coûts de fonctionnement restent trop élevés alors que la compétition sur les tarifs est féroce. Mais c’est justement là que réside notre savoir-faire…

PROPOS RECUEILLIS PAR François Bourboulon

Source: Lesechos.fr

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