Le directeur général d’Orange Mali, Jean-Luc Bohe, emploie 500 personnes à travers tout le pays. En marge d’une visite lundi de la ministre déléguée chargée des Français à l’étranger, Hélène Conway, il a raconté au JDD.fr comment son entreprise avait vécu la crise de ces derniers mois et l’intervention militaire française.
En tant que directeur d’entreprise, comment avez-vous géré l’inquiétude de vos salariés?
Il était important pour nous de mettre en place un certain nombre de mesures. Par exemple, j’ai demandé à tous mes managers de rester disponibles 24 heures sur 24. Dès les premières heures de l’intervention française, une hotline spécifique a été créée pour dire aux salariés que s’ils avaient le moindre problème, ils pouvaient nous appeler. Dans les zones difficiles, aux alentours de Mopti, on est allé jusqu’à récupérer nos salariés et on a mis les familles à l’abri. Même si ce n’est pas fondamentalement nécessaire, ça permet de garder de la sérénité.
D’un point de vue économique, comment avez-vous vécu les derniers mois?
On ressent les difficultés. Ce ne sont pas les mêmes catégories de gens qui téléphonent aujourd’hui. Bien évidemment, les besoins primaires des gens qui souffrent économiquement sont de boire, manger, dormir et ensuite téléphoner. Donc ceux-là téléphonent forcément moins. Est-ce qu’on souffre? Oui, mais il y a un report d’activité qui s’est fait sur les communications internationales.
Quelles mesures de sécurité avez-vous prise après l’intervention militaire au Mali?
Un certain nombre de mesures de sécurité ont été renforcées pour notre personnel et pour tous nos sites partout dans le pays, puisqu’on intervient dans tout le Mali. Concrètement, on ne peut plus se rapprocher des sites, on fait du contrôle d’accès de façon systématique, même de nos clients. Ces mesures avaient été mises en place au mois de mars (lors du coup d’Etat, Ndlr) et elles ont été renforcées dans les heures qui ont suivi l’intervention française. Nous sommes dans un processus d’amélioration permanente pour avoir la réponse adaptée au niveau des risques. Et bien entendu, nous faisons tout cela en relation avec les instances de sécurité des autres groupes et de l’ambassade.
Comment envisagez-vous les mois à venir?
On reconstruit dans le nord puisqu’une partie de nos sites ont été détruits à Gao, à Tombouctou. On a remis en service le site de Tombouctou dans la nuit de samedi à dimanche dernier. Il faut qu’on redonne le téléphone à tout le monde. On a un rôle important vis-à-vis de la population, des entreprises, des ONG. C’est le travail d’aujourd’hui. Et pour demain, je suis comme tout le monde, très préoccupé. S’il y a un effondrement de l’économie, ça serait dramatique. Quand un pays souffre, les entreprises aussi souffrent. Mais j’ai la chance de diriger une entreprise dont les besoins sont importants. Je me dois en plus de conserver ce domaine vital puisqu’aujourd’hui, la télécommunication fait partie du développement de l’économie. Je ne peux pas dire que je suis serein aujourd’hui mais je sais qu’on a quelque chose à apporter à l’économie.