Abdou Karim Sall, Directeur général ARTP sur la portabilité : « C’est transparent pour le client, c’est gratuit et nous avons joué sur les délais… »
L’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (ARTP) lance ce 1er septembre la portabilité des numéros mobiles. Une nouveauté qui va permettre aux clients de choisir l’opérateur qu’ils veulent sans pour autant changer de numéro. A cet effet, son Directeur Général, Abdou Karim Sall nous a accordé cette interview pour entretenir sur les résultats escomptés avec cette nouvelle donne, avant de revenir sur l’actualité avec les fraudeurs sur les appels internationaux, mais aussi la commercialisation de la licence 4G.
L’Artp lance ce mardi la portabilité des numéros de téléphonie mobile. Est-ce que vous pouvez déjà revenir sur cela ?
Tous les Sénégalais vont avoir la possibilité à travers la portabilité de choisir l’opérateur pour pouvoir effectuer les appels et recevoir des appels à partir de ses réseaux. La portabilité consiste à permettre à un client qui était chez un client A de passer chez un client B sans pour autant changer de numéro et de préfixe.
Les sénégalais et tout le monde d’ailleurs, ont ce que l’on appelle une relation affective avec leurs numéros de téléphone. La principale contrainte pour un client de changer d’opérateur, c’était de perdre son numéro en quittant son opérateur. Il est obligé d’en prendre un nouveau. Avec la portabilité, l’occasion est donnée à un client de choisir un opérateur en fonction de sa qualité de service public, mais également en fonction de sa qualité commerciale.
C’est un long processus qui nous a permis aujourd’hui d’avoir la portabilité au Sénégal. Il faut s’en féliciter parce que ce n’est pas simple, nous avons travaillé avec nos équipes. La plupart des opérateurs qui l’ont fait, ont choisi des cabinets pour les accompagner, contrairement à l’ARTP, nous avons travaillé avec des ressources internes bien sûr et avec le concours de professionnels du secteur, notamment les opérateurs de télécommunications.
Comment va se passer le processus sur le terrain. Déjà sera-t-il payant ?
Le processus sur le terrain sera gratuit pour le client et il sera à guichet unique. Pour la France, quand ils ont lancé la portabilité pour la première fois, ils l’ont fait avec ce que l’on appelle le double guichet. Nous avons constaté que le parcours client était très difficile et très laborieux. Nous avons donc opté pour le guichet unique qui consiste à ce que le client qui veut quitter un opérateur A pour aller vers B, de se rendre chez l’opérateur que l’on appelle receveur. Une fois que sa demande est examinée et qu’il est éligible à la portabilité, l’opérateur a 24 heures pour qu’il puisse désormais passer de l’opérateur A au B.
Il y a bien sûr des moments d’interruption, mais qui ne dépasseront pas deux heures de temps. Il y a un troisième acteur, c’est le partenaire qui gère la plateforme de la portabilité, qui coordonne et qui gère la base de données. C’est transparent pour le client, c’est gratuit et nous avons joué sur les délais pour que cela soit le plus court possible.
Et à votre niveau, quels seront les résultats que vous escomptez en lançant la portabilité ?
Le résultat de la portabilité ne se mesure pas par le nombre de numéros portés. Le résultat se mesure par la satisfaction des consommateurs en ce qui concerne leurs possibilités de choisir de quitter ou de rester chez un opérateur. Vous savez, si après le lancement on se rend compte que le nombre de mouvements est très faible. Cela veut dire que les gens eux mêmes ont choisi de rester chez leurs opérateurs. Pourquoi ? Ce sera aux gens de donner leurs réponses.
Moi j’estime que quand on est chez un opérateur, c’est parce qu’on est satisfait de la qualité technique ou commerciale ou des prix qui vous sont appliqués. Je pense que la logique voudrait que quand on n’est pas satisfait par ces trois composantes, que vous quittiez cet opérateur pour aller chez l’autre qui vous offre plus de qualité de services.
Tout autre chose M. le Directeur, avec les fraudeurs sur les appels internationaux. Un réseau a été démantelé dernièrement. Quels est leur modus operandi, le manque à gagner pour l’opérateur et aussi l’Etat ?
La terminaison frauduleuse comme on a l’habitude de l’appeler consiste à transformer une communication internationale en communication locale. Bien sûr à travers un « Gateway» et ce que l’on appelle la « SIM Box ». Celui qui le fait a forcément une connexion internet parce que le trafic international vient sur la voie sur « IP ».
C’est quelque chose de très rependu dans le monde et cela entraîne des pertes significatives pour l’Etat, mais également pour les opérateurs. Nous avons acquis au niveau de l’ARTP un dispositif qui permet de détecter tous appels frauduleux qui entrent sur le territoire sénégalais. Et nous avons acquis du matériel qui permet une fois que nous avons détecté le numéro qui véhicule cet appel frauduleux de le localiser jusque devant la porte de la maison ou de l’appartement où le matériel est installé. Et c’est comme cela que nous fait dernièrement pour mettre la main sur les 3 personnes au niveau de la Gueule Tapée et de Fann-Hock parce que nous avons retenu de travailler avec les forces de l’ordre qui nous ont accompagné une fois que nous avons localisé le matériel.
L’autre élément, c’est par rapport à l’évaluation de l’impact en termes de manque à gagner pour l’Etat. Nous sommes en train de travailler avec l’opérateur qui était impacté (NDLR : expresso), avec les 264 SIM, ils sont en train de faire l’évaluation de l’ensemble du trafic écoulé. D’ici la fin de la semaine, nous aurons des résultats.
Nous, nous avons une mission, celle de faire en sorte que l’on lutte efficacement contre la fraude, l’opérateur qui est lésé a la latitude de porter plainte contre ceux qui ont utilisé de manière frauduleuse son réseau pour faire transiter un trafic qui n’est pas légal.
L’ARTP a mis en place un système de contrôle des appels entrants. Est-ce que cela aura un impact sur les appels via les services internet ?
Dans les appels entrants, il faut distinguer les choses. Nous ce que nous contrôlons, ce n’est pas seulement les appels entrants; le système que nous avons mis en place c’est beaucoup plus. Il permet d’évaluer le trafic entre les opérateurs, mais aussi le trafic entrant et sortant du territoire. Nous sommes un régulateur, nous avons le droit de regard sur les flux de trafic qui entrent et qui sortent du territoire national, mais aussi ceux qui sont échangés entre les différents opérateurs. Aujourd’hui, nous avons fini de mettre nos sondes au niveau des deux opérateurs, le troisième qui est Orange nous sommes en train de travailler avec eux et dans les jours à venir, nous allons finaliser les installations pour nous permettre désormais d’avoir une vue plus globale du trafic échangé à l’intérieur du Sénégal, mais également du trafic entrant et sortant du territoire.
La phase test de la 4G est terminée depuis le 31 mars dernier. Quelle sera la suite ?
La phase test est terminée, nous allons vers celle de la commercialisation. Nous sommes en train de travailler sur des offres que nous allons mettre à la disposition des opérateurs et une fois qu’ils auront accepté, nous allons donner des licences aux opérateurs qui le souhaitent et cela au grand bonheur de ceux-là qui ont besoin de l’internet haut débit.