Audiovisuel: Après la TNT, la télévision connectée fait frémir les grandes chaînes
En 2011, la TNT a représenté 23% de part d’audience (PDA) et les chaînes historiques 65%. En 2009, elle n’avait que 15,2% de PDA et en 2006, 2,7%. Cette montée en puissance a recomposé le PAF. Mais dans les années à venir, le bouleversement devrait être sans commune mesure.
“La télévision connectée” : des mois que les dirigeants de chaînes ne parlent plus que de ça. Si aucun d’entre eux n’est encore en mesure de savoir quand et comment celle-ci va se développer et s’installer pour de bon, l’appétit des Google, Apple et autres Amazon ou Netflix les fait frémir.
Car aussi puissants que soient TF1, Canal+ ou M6 en France, ils font figure de poids plume face à ces nouveaux concurrents, mastodontes avides devant l’énorme gâteau publicitaire de la télévision. Après la musique et la presse, celle-ci va-t-elle être la nouvelle “victime” de la révolution numérique ?
La TV connectée, ce sont toutes les chaînes et le web réunis sur l’écran du salon, soit un choix gigantesque de programmes, vidéos, musique, jeux. Le téléspectateur en sort gagnant : il a le choix, du contenu et de l’horaire, il n’est plus captif des chaînes.
Les chaînes, en revanche, sont perdantes. La concurrence va grandement s’accroître, la fragmentation des audiences, déja accentuée par la TNT, s’accélérer, et donc leur capacité à investir se réduire. Ensuite, elles risquent d’être dépossédées de leurs exclusivités : rien n’empêchera une série ou un événement sportif d’être diffusé directement et exclusivement par un acteur du web.
“Tout le monde dit que la TNT a beaucoup ébranlé les chaînes. Mais ce qui se prépare sur internet, c’est la TNT fois 100”, a prévenu Rodolphe Belmer, directeur général de Canal+.
Pour autant, les chaînes ne s’avouent pas vaincues. Elles ont l’avantage d’être connues, repères au milieu d’un choix qui s’annonce infini.
Nicolas de Tavernost, patron de M6, plaide pour des “groupes forts” et assure que si de nouvelles chaînes sont créées sur la TNT –six devraient l’être en 2012– elles doivent être attribuées aux grands groupes.
“Pour résister, il faut avoir des programmes exclusifs très forts (…). Il faut des séries riches, innovantes”, assure également Rodolphe Belmer.
Pour les chaînes, la difficulté vient aussi de la réglementation française en matière d’audiovisuel –obligations de financer la création, pluralisme (un groupe ne peut détenir que sept chaînes hertziennes), interdiction de diffusion de films les mercredis et samedis soir…– à laquelle les acteurs du web, transnationaux, ne sont pas soumis.
Autant de dispositions sur lesquelles le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) va se pencher dès janvier avec l’ambition de “toiletter” certaines d’entre elles devenues “contre-productives”.
Pour Nonce Paolini, patron de TF1, “la capitalisation boursière de Google, c’est 100 fois celle de TF1. Apple, c’est 50 fois. Devant eux, le protectionnisme ne sert à rien, mais il y a des choses à faire, car iTunes (la plate-forme musique et vidéo d’Apple) paye quatre fois moins de TVA au Luxembourg et Google n’est taxé qu’à hauteur de 5% sur la publicité grâce à un système compliqué de licences”.
“C’est une situation qui nous met dans une situation de faiblesse chronique”, insiste-t-il, soulignant que “tout oppose internet et la TV” : “un univers où il n’y a aucune règle et un autre extraordinairement régulé. Et les deux vont se retrouver en concurrence dans le salon”.
Source: AFP