Le ci-devant représentant de l’opérateur du réseau lors des négociations du Règlement des télécommunications internationales (Rti) à Melbourne, en Australie (1988), juge inopportune la décision de fixer un tarif minimum sur les appels entrants des télécommunications internationales du Sénégal. Au moins pour deux raisons. D’abord parce que, selon M. Touré, si d’abord il faut faire le distinguo entre tarification et facturation, les partenaires des opérateurs nationaux seront peu enclins à l’accepter et risquent, le cas échéant, de répercuter cette « surtaxation ». Ensuite, si les deux motifs évoqués, notamment la lutte contre la fraude et la génération de ressources pour le financement de l’économie sont louables en soi, l’ex-chef du département des politiques, des stratégies et du financement à l’Uit estime que ce n’est pas la meilleure solution. Parce qu’à son avis, la fraude est essentiellement le fait de réseaux Voie Ip (téléphonie via Internet) qui ne seraient pas contrôlables. Alors que l’obligation de déclaration des flux de trafics du pays émetteur vers le pays de destination, ainsi que le développement technologique permettent une transparence quasiment totale. Quant à l’argument économique, il est battu en brèche par ce qui précède, en sus du fait que s’ils sont acceptés, les tarifs fixés par le décret entraîneraient un renchérissement des coûts des appels internationaux du consommateur sénégalais. Mieux, selon l’analyse de l’élasticité de la demande/prix, « les gens vont appeler moins ou ne plus appeler du tout, ce qui aboutirait à une perte de compétitivité. A tous ces griefs que Pape Gorgui Touré veut partager avec tous les acteurs, s’ajoute, selon lui, une éventuelle violation des textes internationaux.
Parce que là où le décret confère à l’Artp une « mission de contrôle et de tarification », le Code des télécommunications ne fait mention du dernier vocable qu’à son article 8 où il parle en fait des « principes de tarification ». Or, il se trouve que, d’une part, le Sénégal a opté pour les principes harmonisés de la Cedeao et que, d’autre part, il passerait ainsi du « régime de partage des revenus de répartition au régime dit de la taxe de terminaison ». Toutes choses qui ont été clairement définies dans les recommandations D.150 aux négociations desquelles M. Touré a pris part en tant que porte-parole des Africains. En effet, dans son discours d’introduction à la conférence de presse, l’expert sénégalais a clairement fixé les limites de la taxe de perception composée de la part non partageable (encaissée par l’opérateur de l’appelant) et la taxe de répartition divisée en quote-part conservée (par l’opérateur de départ) et quote-part à payer (à l’opérateur du prolongement national). Il est clair que la Tva étant payée au départ par l’appelant du pays A, le récepteur dans le pays B ne paie pas de taxe fiscale sur le prix du service. Pour l’ancien négociateur du Sénégal, « la notion de quote-part de l’Etat est étrangère au Rti et aux recommandations de la série D. Qui plus est, il est inacceptable, selon lui, de prélever des recettes fiscales sur les citoyens d’autres pays. La difficulté semble se situer au niveau des définitions, le pays de destination étant en fait exportateur de services. L’importateur, c’est l’appelant, celui où est consommé le service frappé donc de Tva. Pour toutes ces raisons, Pape Gorgui Touré souhaite un large débat pour arriver à une position adaptée au système. L’ancien porte-parole des délégations africaines aux négociations de 1996 à 2000, explique qu’il s’agit d’une question complexe à laquelle il a cru devoir apporter sa contribution « en tant que Sénégalais », mais aussi comme directeur général d’une structure (Tactikom) qui, comme tout autre entrepreneur, a tout à perdre en cas de perturbation dans le secteur.
Fara SAMBE
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