Depuis près d’une décennie, l’Agence de régulation, des télécommunications (ART), l’Agence de régulation des télécommunications et des postes (ARTP) puis l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (ARTP) a été abonnée à la rubrique « faits divers » tellement ont été nombreux et variés les scandales qui ont entaché la gestion de quasiment tous les directeurs généraux qui se sont succédés à sa tête. Pendant ce temps-là, les questions qui auraient dû être au cœur de son activité ont pour l’essentiel été peu, mal, voire pas du tout, prises en charge en négation du mandat qui était le sien et surtout au détriment des intérêts des citoyens, des consommateurs, de l’Etat, du secteur privé, des investisseurs et des innovateurs. Vente sans contrôle de cartes SIM dans la rue avec tous les risques que cela comporte pour la sécurité publique et la sûreté de l’état, multiplication anarchique des promotions par les opérateurs au point qu’il y a de quoi s’interroger sur la sincérité des tarifs pratiqués, difficile lisibilité des offres commerciales qui font que souvent les consommateurs ont le sentiment de s’être faits grugés lorsqu’il ne le sont pas effectivement, faible concurrence qui entretient, de facto, un quasi-monopole de l’opérateur historique dans tous les sous-secteurs du marché, problèmes récurrents de qualité de service en matière de téléphonie mobile comme de fourniture de prestations Internet, nature limitée et cherté des offres commerciales destinées aux particuliers comme aux entreprises, inaction prolongée sur nombre de dossiers critiques en suspens depuis des années (portabilité du numéro, dégroupage de la boucle locale, autorisation des technologies et opérateurs alternatifs, etc.), gestion opaque des processus d’attribution de licence, détournement d’objectif du Fond de développement du service universel des télécommunications (FDSUT) et absence de politique en la matière, etc., tels sont quelques-uns des maux qui affectent la régulation des télécommunications et des TIC depuis plus d’une décennie. Cela étant, force est de reconnaître que depuis la nomination de Thierno Alassane Sall à la tête de l’ARTP en avril 2012, le régulateur semblait avoir pris un nouveau départ, procédant à une réorganisation interne et en se consacrant désormais sur son cœur de métier en organisant notamment des campagnes de mesure de la qualité de service des réseaux de téléphonie mobile et en signant, conjointement avec l’Agence de l’informatique de l’Etat (ADIE), plusieurs protocoles d’accord avec l’Université Gaston Berger de Saint-Louis (UGB) pour la mise en place d’un réseau Wifi sur le campus, avec le ministère de la santé pour le développement d’une application mobile de renforcement de la qualité des soins et avec l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) pour la création d’une polyclinique virtuelle. Auparavant, l’ARTP avait également appuyé l’organisation du Forum national sur la gouvernance de l’Internet initié par le chapitre sénégalais d’Internet Society (ISOC-Sénégal) et s’était montrée disposée à appuyer les manifestations permettant un dialogue inclusif entre les parties prenantes intéressées par les problématiques liées à l’émergence de la société de l’information dans notre pays. Alors que l’ARTP semblait avoir pris un nouveau départ à la faveur de la nomination de son nouveau Directeur général, à la satisfaction d’une majorité d’acteurs à l’extérieur comme à l’intérieur de l’ARTP, ce dernier a été appelé à d’autres fonctions avant même d’avoir pu mener à bien les chantiers qu’il avait lancés. Dès lors, pour le directeur général entrant, le sixième en onze ans, l’alternative est la suivante : confirmer le nouveau départ donné à l’ARTP par son prédécesseur et pouvoir se prévaloir d’avoir permis le décollage du secteur ou retomber dans les errements du passé avec toutes les conséquences funestes qui en découleront pour lui-même mais surtout pour le pays. Toujours est-il qu’un faux départ serait dramatique à l’heure où le gouvernement travaille à l’élaboration d’une stratégie de l’économie numérique et qu’il en a fait un ministère. En effet, comme nous ne cessons de le répéter, dans ce domaine plus que dans d’autres, les occasions perdues ne se rattrapent pas.