Aujourd’hui, avec le développement du Web 2.0 et des logiciels libres, le phénomène s’est amplifié. Nous avons répertorié sur le Web 52 sites basés au Sénégal ou mis en ligne par des Sénégalais résidents à l’étranger (liste complète sur notre blog). Dans ce lot, nous retrouvons les éditions en ligne des quotidiens sénégalais, les journaux exclusivement en ligne, les portails d’informations générales, les portails d’informations locales et les portails spécialisés (santé, immigration, people, histoire, politique, sport…). Aussi, une dizaine de radios FM, de Web radios ou Web TV sont accessibles sur Internet.
Cette situation témoigne d’un certain dynamisme et exige une nécessaire reconfiguration de l’espace médiatique sénégalais. En effet, à côté des médias traditionnels (presse écrite, radio et télévision), la presse en ligne se développe. Ses promoteurs souhaitent être reconnus comme étant des acteurs à part entière.
Les enjeux de la présence de la presse sénégalaise sur le Web sont multiples. Au-delà des enjeux économiques (publicité, payant/non payant), les groupes de presse eux-mêmes, avec ce nouveau support, ont réussi à toucher, donc à informer un plus grand nombre de citoyens.
Cette présence en ligne a permis à des millions de Sénégalais de s’informer régulièrement quel que soit le lieu où l’on se trouve. Au bureau, en un temps record, il est possible de parcourir les plus grands journaux sénégalais et du monde. Avec Internet éclatent les barrières, les distances ainsi que les frontières.
Aujourd’hui, il est de plus en plus fréquent de lire dans les journaux sénégalais des contributions d’expatriés soucieux de donner leur avis sur telle ou telle question d’actualité malgré la distance. Ce qui ne serait évidemment pas possible s’ils n’avaient pas la possibilité de s’informer en permanence grâce à Internet.
Cette présence en ligne pose des problèmes juridiques. Les articles des journaux en ligne, de même que ceux des sites Web des groupes de presse, sont régulièrement reproduits ou même carrément plagiés par des promoteurs d’organes de presse peu scrupuleux. Pour lutter contre ce phénomène, certains éditeurs de presse se sont entendus pour faire circuler sur leur site, des bandeaux interdisant la reproduction de leurs articles « conformément aux lois en vigueur ». Or, dans la loi 2008-09 du 25 janvier 2008 sur le droit d’auteur et les droits voisins au Sénégal, nous pouvons lire : « Art.45. Utilisation à des fins d’information. – 1. Ne sont pas subordonnées au consentement de l’auteur, sous réserve de la mention de son nom et de la source, la reproduction et la communication à des fins d’information des articles d’actualité politique, sociale et économique, ainsi que des discours destinés au public prononcés dans les assemblées politiques, judiciaires, administratives, religieuses ainsi que dans les réunions publiques, d’ordre politique et les cérémonies officielles ». Nous ne sommes pas juriste mais selon notre compréhension, à des fins d’information, si les promoteurs de sites Web qui reproduisent les articles de leurs confrères prennent le soin de citer la source et l’auteur, ils sont en conformité avec la loi. Si notre interprétation est juste, cela ne signifie-t-il pas que cette loi, bien que récente, est déjà dépassée ?
Dans tous les cas, les populations manifestent de plus en plus un besoin d’informations alternatives et citoyennes. C’est peut-être l’une des raisons qui peuvent expliquer l’émergence de nouvelles pratiques journalistiques et citoyennes. L’Internet est parvenu à rompre le monopole de la collecte, du traitement et de la diffusion de l’information que détenaient les journalistes et autres professionnels de l’information. Jean-François Fogel et Bruno Patino vont plus loin en estimant que « Internet n’est pas un support en plus ; c’est la fin du journalisme tel qu’il a vécu jusqu’ici ».
Avec Internet, le rapport au savoir et à l’information a changé. L’interactivité, la gratuité, la multiplication des sources (sites Web, encyclopédies, bibliothèques ou dictionnaires en ligne, blogs, etc.), entre autres, sont autant de nouveaux rapports qui se sont développés au fil des années. Ainsi, aux yeux des citoyens, le journaliste n’a plus la même légitimité face au savoir et à l’information. On pourrait même dire qu’il est relégué au second plan.
Mamadou Ndiaye, enseignant au CESTI
dondiaye@gmail.com
[readon1 url=”http://mamadoundiaye.over-blog.com”]Source : mamadoundiaye.over-blog.com[/readon1]