Vimpelcom, filiale commune au conglomérat russe Alfa – via sa filiale Altimo – et au norvégien Telenor depuis 2009, a depuis cette date affirmé son objectif de cibler les pays émergents.
L’opération conclue le 4 octobre va lui permettre de sortir de Russie et de la Communauté des États indépendants, où ses activités se concentraient jusqu’à maintenant – hormis quelques investissements au Vietnam et au Cambodge – et d’établir sa présence sur trois continents : l’Europe, l’Asie et l’Afrique.
La filiale égyptienne d’Orascom Telecom est exclue de l’opération, mais l’opérateur comptait hors Égypte 73 millions de clients en juin, notamment au Burundi, en Centrafrique, en Namibie et au Zimbabwe, ainsi qu’en Tunisie et en Algérie.
Autant de marchés que récupère Vimpelcom. À l’issue de la transaction, l’opérateur russe deviendra le cinquième groupe de téléphonie mobile au monde avec 174 millions de clients.
France Télécom a renforcé sa présence sur le continent
L’intérêt des opérateurs internationaux de téléphonie mobile pour les marchés émergents ne cesse de se confirmer. France Télécom a annoncé le 21 septembre l’acquisition de 40 % du deuxième opérateur marocain, Méditel, pour un montant de 640 millions d’euros.
Avec plus de 10 millions d’abonnés au téléphone mobile au Maroc, Méditel détient environ 37 % de parts de marché. Il affichait en 2009 un chiffre d’affaires de 465 millions d’euros et une marge d’exploitation de 40 %.
L’opération a permis au premier opérateur français de renforcer sa présence sur le continent. S’implanter dans les pays émergents, et particulièrement en Afrique, est depuis la fin des années 1990 un point central de la stratégie de France Télécom, qui souffre comme ses concurrents d’un marché occidental en voie de saturation.
D’autres opérateurs, comme Vivendi – présent via le numéro un marocain, Maroc Télécom , au Mali, en Mauritanie, au Burkina Faso ou au Gabon – ou le britannique Vodafone – en Libye, en République démocratique du Congo, en Afrique du Sud, en Tanzanie… -, ont aussi développé leur présence en Afrique.
Une croissance de 49,3 % par an depuis 2002
Car le continent présente un fort potentiel de croissance pour le secteur des télécommunications. Une étude du cabinet Ernst & Young de juin 2009 indiquait que le marché africain de la téléphonie mobile avait connu une croissance de 49,3 % par an depuis 2002, contre 7,5 % pour la France, 28 % pour le Brésil et 27,4 % pour l’Asie.
Avec 380,5 millions d’utilisateurs de téléphone mobile fin 2008, selon un rapport du cabinet d’étude spécialisé WCIS, le taux moyen de pénétration du téléphone mobile sur le continent n’est encore que de 37 %.
« Les raisons de s’implanter en Afrique ne manquent pas, souligne Jean-Michel Huet, du cabinet BearingPoint. C’est un marché en forte croissance et un formidable terrain d’innovation. Les conditions de vie appellent au développement de services spécifiques par les opérateurs. »
Soulignant qu’un tiers de la population africaine vit dans une zone qui n’est pas couverte par un réseau de téléphonie mobile, il donne l’exemple d’un nouveau service qui « permet d’être averti par texto lorsqu’une personne qu’on a cherché à joindre repasse en zone couverte ».
“Au Kenya, 30 % des flux financiers se font par mobile”
Les perspectives de commerce via le mobile et de transfert d’argent domestique ou à l’international sont également prometteuses. « Au Kenya, 30 % des flux financiers se font par téléphone mobile, indique Jean-Michel Huet. Cela permet aux opérateurs de fidéliser leur clientèle. »
Les zones Afrique et Moyen-Orient ont représenté l’an dernier 3,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour France Télécom , qui entend doubler ce chiffre d’ici à 2015. L’opérateur avance une marge moyenne d’environ 39 % dans la région, contre 41 % en Europe.
Pour Jean-Michel Huet, « elle est plutôt de l’ordre de 60 %, une fois l’implantation achevée ». Le déploiement du réseau, lors de l’arrivée d’un opérateur dans un pays, nécessite des investissements importants, qui réduisent provisoirement ses marges. Mais « la très forte rentabilité arrive après », explique-t-il.
En s’implantant au Maroc, France Télécom ne choisit pas le marché des télécommunications le plus dynamique d’Afrique : il croît d’environ 5 à 7 % par an, contre 32 % entre 2008 et 2009 pour l’Angola, 36 % pour l’Égypte, 39 % pour le Bénin, voire 44 % au Niger ou 48 % en Ouganda, selon des chiffres du cabinet Booz & Company. Mais le Maroc est un marché moins « difficile » que d’autres en Afrique, où la concurrence est de plus en plus vive.
Les opérateurs occidentaux ont de sérieux concurrents
En Côte d’Ivoire, par exemple, sept opérateurs se livrent une véritable guerre des prix, qui fait chuter les tarifs et réduit les bénéfices. Car face au dynamisme du marché africain , les opérateurs issus de pays émergents manifestent eux aussi de l’intérêt. L’été dernier, le premier opérateur indien de téléphonie mobile, Bharti Airtel, a créé un géant des télécommunications en achetant les actifs africains du Koweïtien Zain.
L’émirati Etisalat poursuit quant à lui son développement sur le continent. La montée en puissance de ces nouveaux acteurs en Afrique, qui semble confirmée par l’arrivée de Vimpelcom, pourrait bien remettre en cause la position dominante des opérateurs occidentaux dans la région.
Camille le TALLEC
[readon1 url=”http://www.la-croix.com”]Source :la-croix.com[/readon1]