Sans faire de tapage, les Maliens ont réalisé la meilleure opération de vente de téléphone en Afrique de l’Ouest. Et permis à Maroc Telecom d’étendre son réseau en Afrique noire.
Le gouvernement malien a réalisé une belle opération avec la vente de l’opérateur traditionnel de téléphonie de ce pays, la Société des télécommunications du Mali (Sotelma) à Maroc Telecom. Depuis le 7 juillet en effet, les Marocains ont payé 275 millions d’euros, ou 180 milliards de francs Cfa, pour acquérir 51% de la compagnie malienne. Le gouvernement sénégalais qui, il y a deux ans, pensait avoir réalisé une bonne affaire avec la vente de la seconde licence de téléphonie globale à Sudatel, devrait se poser des questions, lui qui n’était même pas passé par une procédure régulière et transparente, sous prétexte de réaliser la plus-value la plus importante. A Bamako, en effet, les Marocains ont juste acquis la majorité absolue, c’est-à-dire, 51% de la société malienne, alors que les Soudanais sont les seuls détenteurs de la licence Expresso à Dakar, qu’ils n’ont payé qu’à 80 milliards de francs.
Révision a la hausse
Il faut dire aussi que la concurrence était rude, comme lorsqu’un appel d’offres transparent et offrant toutes les garanties d’équité entre les soumissionnaires est lancé. Après le lancement de l’appel à propositions, plusieurs candidatures se sont manifestées, parmi lesquelles celles de Millicom cellular, la maison-mère de l’opérateur Tigo, bien connu des autorités sénégalaises, la Soudanaise Sudatel, présente également au Sénégal, ainsi que Tunisie Telecom, Portugal Telecom, Telecel Global, et d’autres. Selon une source proche de la présidence de la République du Mali, Maroc Telecom avait fait une offre préalable de 165 milliards de francs Cfa. Sudatel, sans doute instruite par son expérience sénégalaise, avait proposé 75 milliards, tandis que les Portugais enchérissaient à 50 milliards. « Bien que son offre ait été la plus intéressante, Maroc télécom n’avait pas été déclarée adjudicataire de la Sotelma. Son offre devait être acceptée par les pouvoirs publics qui lui ont demandé un surcroît d’efforts financiers. », indique le collaborateur du Président Amadou Toumani Touré. C’est ainsi que les Marocains ont accepté de revoir leur offre à la hausse, et de la porter à 180 milliards de francs Cfa. Ce qui aussi, est un cas unique dans les annales des privatisations de téléphone en Afrique. On comprend donc, dans ces conditions, que le ministre malien de la Communication et des nouvelles technologies, Mme Diarra Mariam Flantié, ait jugé que cette opération est l’une des « plus importantes privatisations jamais menées en Afrique de l’Ouest ». Ni le Sénégal, ni le Burkina, et encore moins le Bénin ou les Guinées, n’avaient jamais réussi à décrocher une telle somme pour la cession de leurs licences de téléphonie mobile.
Bataille féroce
La performance est d’autant plus forte que Sotelma n’est pas, en termes de clientèle ou de part de marché, le premier opérateur du Mali. En effet, en ce qui concerne le secteur mobile, le plus rentable à l’heure actuelle, Ikatel, la filiale de la Sonatel Orange vient bien loin devant, avec un peu plus d’un millions d’abonnés déclarés, alors que l’opérateur traditionnel ne fait pas 700 mille abonnés. Le nouvel actionnaire majoritaire, Maroc Telecom, s’ouvre, en prenant pied au Mali, la possibilité de créer un large réseau interconnecté, qui ira du Maroc au Burkina Faso. Il a en effet, déjà des filiales en Mauritanie, et au Burkina Faso, sans parler du Gabon, reste maintenant l’exécution du plan social. Ils seraient aujourd’hui plus de 600 agents sur les 1 382 que compte la société à être candidats au départ volontaire. Le repreneur de l’opérateur historique va acquérir une société d’un capital de 8,792 milliards de Francs Cfa et qui emploie environ 1 382 agents. L’entreprise possède un portefeuille de 747 407 clients dont 672 045 abonnés au mobile Gsm, 71 282 abonnés au téléphone fixe et 4 080 clients des services Internet. Mais le plus intéressant, pour les Marocains, c’est qu’en termes d’extension, ils vont menacer directement les Français de France Telecom dans leur pré carré. En Afrique de l’Ouest, les deux réseaux, en incluant celui de la Sonatel à la maison-mère, se trouvent aujourd’hui presque à égalité. Et l’on sait que la bataille pour les parts de marché sera impitoyable entre les opérateurs. Paradoxalement, avec les bonnes relations d’affaires qui unissent le Sénégal au royaume chérifien, le nom de Maroc Telecom n’a jamais été cité dans le processus de cession de la licence de téléphonie mobile, qui a fini par échoir à Sudatel. Dans les couloirs du journal Le Quotidien, l’un des procès que nous avons connus dans notre existence, a été dû au fait d’avoir laissé entendre que M. Karim Wade aurait pu avoir intérêt à ce que la compagnie marocaine puisse acquérir cette licence de téléphonie. Celui qui, à l’époque, n’était que conseiller du président de la République, s’était senti diffamé et avait porté plainte. Et depuis lors, on n’a plus jamais entendu parler de Maroc Telecom au Sénégal.
[readon1 url=”http://www.lequotidien.sn”]Source : Le Quotidien[/readon1]