“Je ne reculerai pas dans ma volonté d’instaurer une surtaxe sur les appels internationaux entrants”. Cette phrase de Me Abdoulaye Wade le 10 août dernier lors du Conseil présidentiel sur la “Régulation du tarif des appels téléphoniques internationaux entrants” et réaffirmée le 19 du même mois lors d’un autre Conseil présidentiel “sur la clé de répartition des 60 milliards sur le projet du trafic entrant”, vient d’être mise à exécution. En effet, avant de s’envoler pour La Mecque, le Président de la république a pris le 24 août dernier le “Décret 2011-1271 abrogeant et remplaçant le décret 2010-632 du 28 mai 2010 instituant un système de contrôle et de tarification des communications téléphoniques internationales entrant en république du Sénégal”. En fait ce nouveau décret n’est qu’une reconduction du décret 2010-632, mais avec certes un toilettage de certaines dispositions. C’est ainsi que le tarifs de communications à l’international dans le décret de 2010 sont remis au gout du jour. En effet, selon le nouvel article 6, “une taxe minimale de 0,215 euro, soit 141,035 francs CFA par minute est appliquée aux communications téléphoniques internationales entrant au Sénégal pour la terminaison vers les réseaux fixes et mobiles”. Précisant que ce seuil “est fixé sur la base de la parité fixe suivante : un Euro =655,974 francs Cfa”. Le dit article ajoute que “la quote-part qui revient à l’Etat et qui sera facturée par minute aux opérateurs, par l’ARTP, est fixées à 0,075 Euro, soit 49,20 francs Cfa sur le réseau mobile et 0,115 Euro, soit 75,45 francs Cfa sur le réseau fixe”.
Le Trésor public pourrait ne pas voir la couleur de l’argent
Autre innovation du nouveau décret portant surtaxe sur les appels internationaux entrants : l’argent sera collecté par l’ARTP qui le reversera au Trésor “à moins qu’un décret n’en dispose autrement”. “Le recouvrement et l’encaissement de la quote-part qui revient à l’Etat sont effectués par l’ARTP selon les dispositions ci-après et suivant les modalités pratiques et complémentaires qu’elle aura définies”, dit l’article 8 du nouveau décret qui renchérit : “Sur cette quote-part, l’ARTP, dans le cas ou elle s’attache les services d’un prestataire en application de l’article 4 (NDLR : voir par ailleurs) du présent décret, procède à la rémunération dudit prestataire et reverse la différence dans les caisses du Trésor public à moins q’un décret n’en dispose autrement”.
La procédure de recouvrement a aussi évolué dans le présent décret. Dans le texte de 2010, “les opérateurs (étaient) tenus de régler les factures dans leur intégralité au plus tard le 05 de chaque mois pour la facture du mois antérieur”. Mais dans le nouveau décret (article 9), ils sont plutôt “tenus d’honorer les factures dans leur intégralité, au plus tard, trente jours après leur date d’émission”. Mieux, là où l’ancien texte se faisait menaçant “en cas de retard de paiement de plus de 60 (soixante) jours” avec l’éventualité d’un retrait de “l’autorisation d’acheminer des télécommunications internationales entrant au Sénégal, en application de l’article 25 du Code des télécommunications”, le nouveau souligne que “l’opérateur en défaut de paiement s’expose aux procédures de recouvrement des deniers publics prévues par la législation en vigueur”.
Les conditions de paiement adoucies
L’autre bizarrerie dans ce décret, c’est que seul le Ministère de la Communication et des télécommunications qui “est chargé de l’exécution du présent décret” a des incidences financières. Le ministères des Finances est ainsi mis hors heu alors que l’on parle de taxes qui devraient normalement être recouvrées par les servies compétents du Trésor et des Impôts.
Et pour justifier ce décret, le rapport de présentation souligne que “l’Etat du Sénégal a le souci légitime de connaitre le volume du trafic téléphonique international entrant, ceci d’autant plus que la destination Sénégal est l’une des plus prisées par ce trafic”. D’après l’Etat, “cette opportunité est une source importante de génération de revenus dont le Gouvernement entend faire bénéficier la Nation toute entière à travers plusieurs projets. Il s’agit , entre autres, de la création d’un fonds de l’habitat pour les émigrés, de la construction de case des tout-petits dans les zones qui n’ne disposent pas encore, de la mise en place de cyber-cases pour l’information et la formation des populations, de la création de forages, de l’achat d’ordinateurs pour donner corps à la vision du Chef de l’Etat de compter sur le numérique pour accélérer le développement du Sénégal, de la consolidation du fonds de l’énergie, des aides aux coopératives du secteur des télécommunications”.
Il faut dire que ce décret sonne un coup de massue chez les travailleurs de la Sonatel et ses dirigeants. Faut-il souligner que le Président avait assuré Cheikh Tidiane Mbaye, Directeur général de la Sonatel qu’il se donnait un délai d’un mois de concertation avant de mettre en place le système. C’état le 10 août dernier. Pis Moustapha Guirassy, Ministre des Télécommunications, assurait sur les plateaux de WalfTV, lors de l’émission “Opinion” de la semaine dernière reprises par “Le Pays”, que “l’Etat ne sera pas dans une logique de confrontation” avec les sonatéliens “pour cette affaire de surtaxe”. Mais il s’est juste passé 14 jours avant que le décret ne tombe.
Bachir Fofana
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